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La porcelaine soviétique

La situation politique était difficile et les bolchéviques cherchaient à convaincre la population par tous les moyens possibles.

Plusieurs centaines de pièces, bibelots ou vaisselle, colorées et souvent surprenantes pour un oeil occidental, sont actuellement exposées au Musée russe des Arts appliqués à Moscou, illustrant un aspect peu connu de la gigantesque machine de propagande mise sur pied par l’URSS.

« Le règne des ouvriers et des paysans n’aura pas de fin ! » clame le slogan gracieusement peint sur une assiette décorée comme une oeuvre d’art: le régime soviétique était si féru de propagande marxiste qu’il usait paradoxalement de supports aussi « bourgeois » que la porcelaine.

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Sans surprise, tous les thèmes chers au régime sont représentés: conductrices de tracteur, soldats de l’armée rouge et fiers ouvriers, faucilles et marteaux et bien sûr les incontournables statuettes de Lénine.

Certaines pièces affichent des slogans proverbiaux comme « Qui ne travaille pas, ne mange pas ! ». D’autres, de haut faits comme la construction du canal Volga-Don, creusé par des détenus du goulag dans les années 1930…

Le régime ne s’est pas contenté d’évincer tous les symboles du tsarisme en fabriquant à la chaîne films à sa propre gloire et statues aux nouveaux héros: il a fait en sorte que les nouvelles valeurs idéologiques soient omniprésentes dans la vie quotidienne des Soviétiques, jusque sur les tissus et la porcelaine.

Cette dernière, initialement destinée aux cantines publiques et aux vaisseliers de salon qu’ont de tout temps affectionnés les Russes, fait aujourd’hui figure de rareté et est très convoitée par les collectionneurs.

Souvent conçues par des peintres avant-gardistes de renommée mondiale, comme Kazemir Malevitch et Vassili Kandinski, les céramiques étaient fabriquées à l’usine de Porcelaine d’Etat, ancienne Manufacture impériale nationalisée juste après la Révolution de 1917.

Cette fabrique située à Saint-Pétersbourg était connue depuis le 18e siècle pour ces pièces, considérées comme les plus raffinées de Russie et d’Europe.

C’est là que les célèbres soeurs artistes Natalia et Elena Danko ont exécuté en 1923 leurs plus belles broches et pipes de porcelaine « idéologiques », ainsi que des figurines, dont une ouvrière à foulard rouge qui, fabriquée en série, deviendra l’un des symboles du jeune Etat soviétique.

En 1922, en pleine guerre civile, les soeurs Danko, l’une sculptrice et l’autre peintre, exécutent un superbe jeu d’échecs dans lequel s’opposent « Rouges » et « Blancs ».

Chez les rouges, un ouvrier et une paysanne jouent le rôle du roi et de la reine. Chez les blancs, ils ont été remplacés par un squelette en armure et une femme à l’allure décadente. Les pions rouges sont des paysans, et les blancs des esclaves enchaînés, symboles des victimes du capitalisme.

Exécutés à un nombre limité, ces sèvres étaient « révolutionnaires dans le style, parfaites dans la forme et sans défaut dans la fabrication », comme le requérait le Parti bolchévique. Pourtant, de l’avis des experts, les figurines des ennemis du régime ont paradoxalement été mieux rendues que celles des Soviets.

La propagande sur porcelaine, loin d’être une invention soviétique, remonte à l’époque tsariste. Nombre d’assiettes ont été frappées du portrait du maréchal russe Mikhaïl Koutouzov, vainqueur du Français Napoléon en 1812.

Mais contrairement à ces pièces, destinées à l’aristocratie russe de l’époque, la propagande sur porcelaine soviétique visait les masses laborieuses, ainsi que l’étranger où elles étaient exportées en masse.

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par | 22 Mai 2010 | 0 commentaires

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